Hélène Berr | Françoise Bernheim

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"C'était une jeune fille radieuse. Elle riait souvent et son rire était adorablement franc, clair et contagieux. Tout y participait : les yeux derrière les lunettes en écaille, le petit nez régulier, la bouche délicatement dessinée, les joues fraîches et roses. Sa petite taille très harmonieuse, ses gestes vifs, mais un peu timides et gauches lui donnaient l'apparence d'une jeune fille charmante, pure et très jeune. Son regard éveillé, pénétrant et très attentif avec une pointe de malice amusée, laissait deviner une grande maturité d'esprit et la profondeur de sa sensibilité. Elle avait eu une enfance heureuse et beaucoup d'amies. Elle était destinée à semer autour d'elle la gaîté, la joie de vivre pleinement et sainement, la bonne humeur et la propreté dans les actions et dans les pensées."   (Wellers, 1946, p.168)

Ce portrait pourrait être celui d'Hélène Berr. C'est celui de Françoise Bernheim. Leurs histoires se superposent.

Elles ont été élevées à quelques rues l'une de l'autre. L'une travaillait bénévolement à la librairie de l'Américaine Sylvia Beach, Shakespeare and Company. Elle était parfaitement bilingue -élevée par une gouvernante anglaise après la mort prématurée de sa mère - et aimait prendre le thé à W.H. Smith. L'autre passait son temps libre à la librairie pour anglicistes, Galignani. L'une étudiait le sanscrit à la Sorbonne. L'autre l'anglais. Toutes les deux ont été exclues de l'université par les statuts des Juifs. Toutes les deux deviennent assistantes sociales à l'UGIF, en 1942.  Le père de Françoise est arrêté le 12 décembre 1941, comme celui de Claude Bloch,  et libéré l'été suivant, en tant que parent d'un membre de l'UGIF, comme celui d'Hélène. Cette dernière nous laisse entrevoir le quotidien de cette collègue  de la rue de la Bienfaisance. Mais c'est surtout à travers le vide que Françoise laisse après son arrestation, le 30 juillet 1943, qu'Hélène nous la rend proche. Quelques années plus tard, nous la retrouvons à travers les mots de Georges Wellers qui lui redonnent un visage et une voix alors qu'elle est aux portes de la mort.

Hélène Berr | Françoise Bernheim